Dick Giordano est un scénariste, dessinateur, encreur et responsable éditorial. De 1952 à 2010, Il travaille pour de nombreuses maisons d’édition parmi lesquelles Charlton, Dc, Marvel ou Atlas comics et collabore avec les plus grands : Steve DitkoNeal Adams, Jim Aparo ou encore Carmine InfantinoIl décède à 77 ans, des suites d’une leucémie.

Comment avez-vous intégré la série Green Lantern/Green Arrow ?

Les quatre premiers épisodes de la série avaient été encrés par Neal luimême, Dan ADKINS et Frank GIACOIA. Je ne me rappelle plus pourquoi, mais le cinquième épisode avait été confé à un freelance, Mike PEPPE. Une semaine plus tard, quelque chose arriva – une fois encore, je ne me souviens pas quoi- et on me demanda de donner un coup de main à Mike sur le projet. Il avait encré quelques éléments par-ci, par-là mais n’avait rien terminé. Bref, j’ai donc terminé l’épisode et devint en quelque sorte l’encreur régulier de la série. PEPPE n’a jamais été crédité une seule fois… Peut-être parce que sa contribution n’avait pas  été jugée à la hauteur… Mais dans le fond je n’en sais pas plus. Pour ma part, j’étais ravi de rejoindre Neal et Denny sur Green Lantern/ Green arrow. À cette époque, j’étais rédacteur en chef, et comme c’est souvent le cas, je partageais mon bureau avec un autre rédac chef… Julius SCHARTZ ! J’étais donc présent lorsque le projet est né, lorsque les premières idées de scénario ont été avancées. J’avais même vu Neal dessiner les premiers épisodes puisque son bureau était juste en face du mien, de l’autre côté du couloir. Dès le début, on pouvait dire qu’ils tenaient une bonne série. J’ai adoré y participer et retravailler avec Neal. Car avant ça, nous avions fait quelques épisodes de worLd’s Finest ensemble, pour Mort WEISINGER. Une sorte d’échaufement avant le grand GL/GA.

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Aviez-vous déjà eu l’occasion de travailler avec Dennis O’NEIL ?
Aviez-vous une opinion sur ce qu’il écrivait ?

Oui. Denny et moi avions travaillé ensemble pour Charlton Comics1. À l’époque, il utilisait un nom d’emprunt, Sergius O’SHAuGNESSy. Je pense qu’il ne tenait pas à ce que Marvel (pour qui il écrivait aussi) sache qu’il bossait avec nous. Lorsqu’il a commencé, je me rappelle lui avoir dit qu’il ne gagnerait pas des milles et des cents, mais qu’il s’éclaterait ! Et j’ai tenu parole. De diférentes manières, ce fut sa période la plus créative. Il avait à peu de chose près un contrôle total sur ce qu’il écrivait, et il en proftait pleinement. Il compensait son manque de maîtrise par un enthousiasme sans borne. Denny est quelqu’un d’intelligent, d’attentionné, de perspicace, et c’est un très bon écrivain. J’ai beaucoup aimé travailler avec lui et j’espère sincèrement que ça se reproduira. Après avoir encré trois histoires de GL/Ga, Berni WRIGHTSON a pris la relève sur un épisode.

 

Si vous aimiez la série, pourquoi ce changement ?

J’avais l’intention d’encrer cet épisode, mais je suis tombé malade. Une mauvaise grippe. Je somnolais dans mon lit, et je me rappelle avoir pensé : « il faut absolument que je me lève, le numéro est déjà en retard (Neal l’était toujours). Si je ne m’y mets pas, il ne sortira pas. » Mais j’étais vraiment dans un trop sale état pour pouvoir travailler. Ça a duré des jours. Un matin, quelqu’un a sonné à la porte. J’ai entendu Sol HARRISON (le responsable de production de l’époque, chez DC) parler à ma femme, Marie. Sol vivait à Bridgeport, Mon coeur s’est arrêté. J’ai alors crié : « Ne les lui donne pas, chérie ! ». Du moins, c’est ce que j’ai cru. Plus tard, Marie m’a dit qu’elle n’avait rien entendu. Lorsque je me suis réveillé, les planches n’étaient plus là. Je n’ai appris que plus tard qui les avait terminées. Je pense que Berni était un choix de Neal.

Si l’on en croit les crédits, l’épisode suivant a été encré par Neal lui-même.

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Est-ce que vous vous souvenez pourquoi il souhaitait s’en occuper ?

Je pense que Neal étais tellement impliqué dans ce projet, qu’il voulait aussi expérimenter cette partie du travail. De plus, comme j’étais encore hors-course pour deux semaines, c’était l’occasion.

 

Parlons un peu de ce récit centré sur les problèmes de drogues. C’était plutôt osé pour l’époque. De qui est venue cette idée ? Y a-t-il eu des résistances du côté de la direction de DC ?

S’il y en a eu, je n’en ai jamais entendu parler ! La série faisait parler d’elle, mais tout le monde pensait que nous devions accentuer cette problématique, pour la rendre plus spectaculaire, plus dramatique, et souligner davantage les dangers de ce genre d’expérimentations. Nous avons eu quelques remarques du Code (Comic Code Authority), mais sur des détails. Par exemple, on nous a demandé d’être moins explicites dans une scène où Speedy se shootait.

 

Avez-vous des souvenirs particuliers sur votre collaboration à la série GL/Ga ?

Seulement le plaisir immense que j’ai eu de pouvoir travailler sur quelque chose de si spécial, et avec des gens qui se souciaient vraiment de ce qu’ils faisaient. Le résultat est aussi bon que ce que nous pouvions l’espérer à cette époque. Julius, Denny, Neal et moi avons fait tout donner. Visiblement, Neal et vous avez apprécié travailler l’un avec l’autre. En plus de GL/Ga, vous avez notamment oeuvé ensemble sur un certain nombre d’histoires du Batman.

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Pouvez-vous nous en dire plus sur la relation que vous entreteniez tous les deux durant toutes ces années ?

Comme toutes les relations, la nôtre a évolué. Et c’est encore le cas aujourd’hui. À l’époque, nous étions vraiment sur la même longueur d’ondes. Nous nous comprenions sans même avoir à nous parler. C’en était inquiétant. J’aime a penser que notre relation est basée sur un profond respect, de nos compétences, de nos états d’esprit, peut importe les désaccords que nous avions à ce moment-là. Pensez-vous que GL/Ga a été un tournant décisif dans votre carrière ? Et pensez-vous que vos compétences sur ce projet vous ont, d’une manière ou d’une autre, permis d’atteindre le poste que vous tenez aujourd’hui au sein de DC Comics (éditeur) ? Non, pas vraiment. J’étais juste le quatrième gars de l’équipe. Je n’ai pas eu mon mot à dire dans l’élaboration du scénario et je n’ai même pas encré l’intégralité de la série. Sept autres numéros ont même été encrés par d’autres, dont trois par Neal. Mais l’efort conjugué de chaque membre de l’équipe, l’enthousiasme de tous, a changé pour toujours ma perception du travail et m’a conforté dans l’idée que s’investir à 200 % dans un projet vaut vraiment la peine. C’est peut-être cette vision qui m’a amené là où je suis aujourd’hui. En tout cas, c’est ce que j’aime me dire.

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