Batman peut se vanter de compter, dans la galerie de gredins qu’il affronte au quotidien, certaines des super-vilaines les plus célèbres et les plus troublantes de la bande dessinée américaine. De Catwoman à Talia al Ghul en passant par Nocturna, elles sont nombreuses, les belles méchantes, à combattre le protecteur de Gotham. Et Poison Ivy est sans doute la plus vénéneuse.

Pendant longtemps, les super-vilaines ont brillé par leur absence dans les comic books de super-héros. La raison en est simple : au milieu des années 1950, avec le succès de Seduction of the Innocent, ouvrage de Fredric WERTHAM, et après l’édification du Comics Code, les mensuels de bande dessinée ont été copieusement édulcorés.

 

Les raisons d’une absence

Les éditeurs veillaient bien à gommer des récits toute scène de gore ou toute représentation positive de la drogue ou de la criminalité. L’inquiétude était telle que les relations de séduction qui parfois régnaient entre le héros et son ennemie étaient sujet à caution. C’est ainsi que, pendant une dizaine d’année, Catwoman a disparu des aventures de Batman, et
n’a dû son retour en grâce qu’à l’assouplissement discret du Code et au succès de la série télévisée Batman qui, dès janvier 1966, confère au héros une popularité inouïe.

Catwoman avait fait sa dernière apparition en 1954, et réapparaît dans les comic books en 1966. C’est l’année que choisit également Pamela Isley pour jaillir dans la vie de Batman !

Catwoman contre Poison Ivy : deux séductrices se disputent les faveurs de Bruce Wayne. Extrait de Batman : Un long Halloween (dessin de Tim SALE).

Mauvaise graine

Poison Ivy fait sa première apparition dans les pages de Batman #181, en juin 1966. Elle est inventée par Robert KANIGHER et Sheldon MOLDOFF. Arborant une coupe à la Bettie PAGE,
elle se présente comme une tentatrice, une séductrice, ce qui constitue en soi un pied de nez aux règles strictes imposées par le Comics Code. Outre la référence au modèle Bettie PAGE, on peut voir dans le personnage une référence au texte de Nathaniel HAWTHORNE, « Rappaccini’s Daughter », qui raconte l’histoire d’une jeune femme devenue toxique pour les autres. Le personnage se développe lentement, gagnant en popularité dans les années 1980. Neil GAIMAN précise ses origines dans Secret Origins #36, en 1988. On apprend à cette occasion qu’elle a fait ses études avec Alec Holland, qui deviendra plus tard la Créature des Marais, et avec Jason Woodrue, également connu sous le nom de l’Homme Floronique.  Au fur et à mesure des épisodes, il est même précisé que Woodrue a mené des expériences sur Pamela, lui conférant ses pouvoirs de contrôle végétal.

Les pouvoirs de contrôle mental de Poison Ivy sont presque irrésistibles. Extrait de Batman : Un long Halloween (dessin de Tim SALE).

Militante

Considérée comme une empoisonneuse, capable également d’hypnotiser et de contrôler les hommes sur qui elle projette ses poisons, ses phéromones et ses pollens, Poison Ivy devient célèbre grâce à ses multiples apparitions dans les différents cartoons consacrés au Chevalier Noir, à commencer par Batman The Animated Series. Elle y est présentée comme un adversaire de taille, capable de fabriquer divers poisons à partir d’essences végétales rares ou de pollens, mais également entourée de plantes carnivores géantes, ce qui n’est pas sans évoquer Audrey Junior, la fleur mangeuse d’homme de La Petite boutique des horreurs, film de Roger CORMAN (1960).

Étonnamment, Poison Ivy n’a jamais été considérée comme une méchante d’un seul bloc. Comme beaucoup d’ennemis de Batman, elle a un passé douloureux et ses motivations dépassent le simple appât du gain. Considérée pendant un temps comme une incarnation de la femme moderne et comme une figure du combat féministe, elle est aujourd’hui la représentation de la lutte écologiste. Quand Gotham City est ravagé par un tremblement de terre, elle prend possession du Parc Robinson pour y installer un paradis tropical. C’est dans la perspective d’obtenir les moyens de protéger la nature qu’elle s’allie pendant un temps avec les Birds of Prey, dans l’univers de la « Renaissance DC ». Mais leur alliance ne dure pas, Ivy étant trop radicale pour les autres « oiseaux de proie ». Elle décide alors d’agir en solo, et retrouve son statut d’écoterroriste. Aujourd’hui, ses actions, qui visent
les grandes zones industrielles abandonnées autour de Gotham, véritables cauchemars écologiques, la conduisent à affronter à nouveau Batman

Mais Poison Ivy a bien des tours dans son sac, et si Batman sait comment se protéger des phéromones et des pollens qu’elle utilise pour contrôler ses victimes, elle a prévu, de son côté, de lui mettre de nombreux bâtons dans les roues.

 

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