Eric Van Lustbader est un écrivain américain spécialisé dans le thriller et la fantasy, il est notamment connu pour avoir succédé à Robert Ludlum sur la série Jason Bourne. Il revient sur Batman Red Rain publié dans Batman Vampire, un univers gothique, dense à souhait !

C ’est bien Prince qui a écrit « J’ai vu le futur et il fonctionne » *, pas vrai ? Oui, c’est ça. Je suppose qu’il devait parler de ce futur possible en particulier, celui qui nous terrifie d’autant plus qu’il nous paraît si proche.

Je n’ai jamais beaucoup aimé le mélange entre personnages issus de différents univers imaginaires, principalement parce que, qu’on le veuille ou non, le résultat final finit trop souvent par ressembler à une pantalonnade du genre de Deux nigauds et la momie. Ainsi, ce n’est pas sans une certaine appréhension que j’ai accepté de jeter un coup d’œil à RED RAIN, premier exemple de greffe entre Batman et Dracula.

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J’avoue sans honte que je me suis senti conquis dès la première case. Pourquoi pas ? Le scénario de Doug MOENCH et les images de messieurs JONES & JONES nous offrent un Batman sensiblement différent du canon, mais dont le portrait respecte pourtant toutes les caractéristiques morales et intellectuelles du personnage. J’ai toujours estimé que Batman, en tant qu’habitant du monde de la nuit, s’adressait directement à la part instinctive de ses lecteurs. On ne pense pas Batman, on le ressent. Et au milieu de ma lecture de RED RAIN, je me suis rendu compte que j’avais eu la même réflexion en lisant l’excellent roman qu’est Dracula, de Bram STOKER. Bien sûr, pendant toutes ces années où j’ai lu les aventures de Batman, je me suis souvent demandé si Dracula, un personnage si mythique, puissant, charismatique et érotique, avait joué un quelconque rôle dans la création du Chevalier Noir. Car même si Batman est et a toujours été un champion de la justice… c’est une justice particulière, faite de peur, d’intimidation et de vengeance qu’il exerce. À l’origine, Bruce Wayne se fixe pour objectif d’inspirer la terreur à tous les criminels, rien de moins. Il faut bien l’admettre. Ce qui fait de Batman un héros si captivant, c’est sa puissance, son charisme et son érotisme. Il n’est donc pas étonnant de le retrouver marqué du sceau de Dracula dans ce futur possible et si proche de lui.

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Gotham semble mûre pour être cueillie par le seigneur des vampires, pas vrai ? Ce marais urbain, sombre et lugubre, est devenu un monde de cauchemar comme tant de nos paysages citadins postmodernes, habité par des untermenschen titubants, soumis à un pourrissement visiblement irrémédiable. Toute lumière a disparu, seules subsistent les ténèbres. Batman, qui parcourt ces ombres, fut avant tout créé pour être un détective.

17FR_INT_BATMAN-VAMPIRE_00_FR_PG008-049-(1)Consciemment ou pas, il s’est fixé comme premier but de trouver l’assassin de ses parents. Mais il n’a rien d’un détective classique. Sherlock Holmes ou Nero Wolfe se caractérisent d’abord par leur esprit de déduction, et Philip Marlowe ou Sam Spade d’abord par leur violence. Batman est à la croisée des chemins, aussi bien fin limier que partisan du coup de poing. RED RAIN capture à merveille cette fusion de l’esprit analytique et de l’instinct viscéral. Ce n’est pas évident de donner un sens et un intérêt à la rencontre entre deux figures mythiques aux environnements si disparates. Vous n’y trouverez pas une interminable bagarre entre les deux vedettes, étalée sur une quarantaine de pages : ce genre de crossover, j’en ai lu des milliers, et j’en ai soupé. Ce récit a autre chose à vous montrer qu’un échange de torgnoles entre hommes-chauves-souris. Et bizarrement, son sujet semble plus pertinent aujourd’hui qu’il y a ne serait-ce que deux ans ** . Voici qu’arrive le début de la fn de nos rêves.

La mort, la destruction et la nuit. Quel meilleur casting pour ce drame final, joué sur une scène sordide, que Dracula et Batman ? Et qui pourrait prédire l’ahurissante conclusion de ce drame ? Pas moi. Et je gage que vous ne la devinerez pas davantage. Jamais auparavant Batman ne nous a paru si humain. Jamais il n’a incarné si profondément le gardien inflexible de nos rêves, le vengeur noir de nos chagrins et de nos peurs. Cet ouvrage vous présente une réalité alternative qui ne manquera pas de vous surprendre et de vous distraire. Et comme disait Prince, « j’ai vu le futur, et mon vieux, c’est galère » *** .

 

* « I’ve seen the future and it works », refrain de « The Future » , premier titre de l’album-concept que le musicien Prince (1958-2016) consacre au flm Batman (1989) de Tim BURTON. – NDT.
**  Cette préface fut publiée en préambule à la première édition américaine de RED RAIN, en 1991. On laissera au lecteur le loisir de deviner à quels évènements signifcatifs Van LUSTBADER pourrait faire allusion. La chute du mur de Berlin ? La Première Guerre du Golfe ? Mystère. – NDT.
*** « I’ve seen the future, and, boy, it’s rough ».

 

 

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Découvrir Batman Vampire

Il rôde dans les recoins des plus sombres de la ville, cherche à protéger les innocents d’une armée de vampires en quête de festins nocturnes. Y parviendra-t-il avant de lui-même succomber à la soif dévorante de sang humain ? Le Batman est devenu l’un des leurs, rongé par le désir et la culpabilité

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