WYND c’est le récit d’aventures haletant accompagné d’une quête d’identité particulièrement touchante.

L’adolescence est un âge charnière où l’on se questionne beaucoup sur soi et où la différence de l’Autre peut parfois faire peur. WYND aborde avec beaucoup de bienveillance et d’espoir le mal-être, l’incompréhension et le manque de confiance que beaucoup de jeunes peuvent ressentir !

1. Pouvez-vous nous raconter la genèse de WYND ? Quelles ont été vos inspirations ou l’élément déclencheur qui vous a poussé à écrire cette histoire ?

James Tynion IV : Cette histoire m’accompagne depuis que je suis adolescent. À vrai dire, j’ai même écrit toute sa structure dans des cahiers alors que j’étais encore au lycée. Je préférais me plonger dans des descriptions de personnages et imaginer un monde de toutes pièces plutôt que de suivre les cours. Je dois beaucoup de mes concepts d’histoire à cette époque. Wynd, son sang magique, ses oreilles pointues et ses rêves étranges en font partie. L’idée d’un prince effrayé par ses responsabilités et essayant d’échapper à la complexité de la politique humaine aussi.

Au fond de moi, j’ai toujours su que je reviendrai un jour à cette histoire pour la mener à son terme, mais je savais aussi que c’était un projet d’envergure qui ne pourrait pas être raconté en un seul volume. À un moment donné de ma carrière, lorsque j’ai été sûr de pouvoir m’y consacrer pleinement, je l’ai tiré de son hibernation. Tout ça a coïncidé avec un déplacement en Grèce, à Thessalonique, pour une convention, où j’ai retrouvé Michael Dialynas. Nous avions tous les deux très envie de retravailler ensemble alors je me suis mis à lui parler de mon épopée fantastique adolescente, et nous avons immédiatement échangé tout un tas d’idées sur le sujet. À la fin du week-end, nous avions développé tout l’univers magique de ce monde (et les fleurfadets qui l’alimentent), l’Écorché comme méchant et la ville de Tubeville.

2. Cette histoire est celle d’une quête d’identité, d’une acceptation de soi, mais aussi et surtout une façon d’aborder la question de l’Autre et de ses différences. Était-ce votre ambition dès le départ, d’imaginer une histoire sur le thème du racisme, de la discrimination ?

James : Quand j’ai commencé à réfléchir à Wynd et au monde d’Esseriel, j’étais un jeune queer, cloîtré dans un lycée catholique pour garçons à Milwaukee, en pleine présidentielle Bush. À cette époque, on criminalisait beaucoup les homosexuels et l’idée même de légaliser le mariage pour les couples de même sexe en dérangeait plus d’un. C’est ce sentiment d’être « autre » que j’ai voulu aborder dans ce livre, en particulier parce qu’au tout début de l’histoire, Wynd peut tout à fait « passer pour » un être humain, tout comme je pouvais « passer pour » un hétéro… Seulement, avec le temps, je m’apercevais que plus je devenais moi-même, moins je pouvais me cacher. Je perdais cette capacité à me fondre dans ces environnements hétéros, et ça me terrifiait. Dans WYND, j’ai voulu élargir cette question de la discrimination à un niveau à la fois extérieur et intérieur.

3. Cette histoire est-elle une réponse à notre triste époque, qui voit se multiplier le repli sur soi, l’égoïsme, la violence ? Une façon de dénoncer, mais aussi d’être optimiste, avec cette idée de monde meilleur qui existerait quelque part ?

James : Oh, je crois que ces derniers temps tous mes livres abordent mes angoisses à propos du monde dans lequel nous vivons, de mes aventures pour enfants à mes histoires d’horreur pour adultes. WYND parle beaucoup de la peur des autres et de la peur du changement. À l’heure où j’écris ces lignes, je suis en train de terminer le deuxième volume, et je suis très heureux de voir à quel point on peut aborder toutes ces questions sous des angles divers. Mais oui, l’idée de s’isoler de tout ce qui nous inquiète ou pourrait nous blesser est un thème central de ce récit de fantasy. Au fur et à mesure du voyage, on voit les personnages rêver d’un endroit où la vie serait plus facile, mais ce qu’ils trouveront de l’autre côté du continent, quoi que ce soit, sera bien réel. Rien n’est jamais évident, mais je pense qu’on peut tous dénicher un endroit dans ce vaste monde où l’on se sentira bien et d’où l’on pourra agir pour un monde un peu meilleur. On ne répare pas un système tout seul, mais on peut déjà commencer à faire le Bien autour de soi. Je suis ravi de pouvoir explorer tout ça dans cette série.

4. Michael, comment se sont passées les recherches graphiques autour de Wynd et de son univers ? Avez-vous visualisé le personnage immédiatement ? Quelles ont été vos sources d’inspiration ? Quel personnage/créature vous a donné le plus de fil à retordre ?

Michael Dialynas : Quand James et moi avons fini de discuter de l’histoire et de comment nous pourrions en faire une réalité, je lui ai demandé comment il imaginait Wynd et il m’a donné trois détails physiques : pâle, les yeux écarquillés et les cheveux hirsutes pour cacher ses oreilles. C’était suffisant pour que je puisse le dessiner immédiatement sur mon carnet de croquis, et il ressemblait à peu de choses près à ce qu’il est sur la couverture du premier volume. La seule différence, c’est qu’il ne portait pas encore sa petite cape. À l’époque, je dessinais les Tortues Ninja donc j’ai mis quelques mois à mettre au point tous les croquis du monde d’Esseriel, et en particulier de Tubeville, là où se passe toute la première partie de l’intrigue. Nous tenions vraiment à créer un monde  fantastique qui n’ait rien de commun avec celui du lecteur.

En règle général, pour ce genre d’histoires, beaucoup optent pour l’esthétique médiévale steampunk, mais je voulais essayer quelque chose d’un peu différent. Je me suis inspiré de beaucoup de paysages colorés, de villages balnéaires construits les uns sur les autres, comme vous pourriez en voir en Grèce. Beaucoup de petites maisons, de fenêtres, de ruelles en pentes qui vous mènent en haut de collines, et puis des rivières pour entourer la ville. Je voulais aussi ajouter des éléments plus contemporains, comme le street art, pour appuyer le manque de cette population qui n’a jamais vu une fleur de sa vie. Les jeunes artistes couvrent les murs de peintures végétales en réaction à cette interdiction d’entrer en contact avec la magie verte de la nature. Je pourrais passer des mois à imaginer chaque bâtiment, à dessiner chaque magasin et chaque citoyen de cette ville !

Curieusement, je pense que le personnage que j’ai eu le plus de mal à définir, c’est la créature qui apparaît dans les cauchemars de Wynd. J’ai dû la dessiner au moins dix fois, et chaque fois je la trouvais trop ou pas assez effrayante. Parfois, elle n’était qu’un oiseau noir, à d’autres moment c’était un monstre à quatre yeux. Il m’a fallu un peu de temps, mais je suis fier du résultat final.

5. Comment fonctionne votre binôme ? James vous laisse-t-il une liberté totale de création ou vous donne-t-il énormément de détails sur sa vision des choses au moment du script ?

Michael : Heureusement, les messageries instantanées existent ! Ça nous a permis de beaucoup discuter, et ce pour chaque étape de l’histoire. En ce moment, nous échangeons beaucoup sur la fin du deuxième volume, sur la manière d’amener les points d’intrigue auxquels James a pensé et, pour moi, de les dessiner à ma façon. De mon point de vue, James écrit les meilleurs scripts dont un dessinateur puisse rêver. Il laisse suffisamment d’espace à ma créativité pour que je puisse jouer avec les éléments qu’il me donne. Généralement, je passe quelques jours à esquisser des personnages, des lieux ou des compositions de page, puis j’attaque les planches définitives une par une. On travaille ensemble depuis 2013 donc on sait comment il pense et fonctionne. On sait qu’on peut s’appeler n’importe quand.

6. Quel est votre personnage préféré ?

James : J’ai adoré écrire le personnage de Yorik. Il y a quelque chose d’assez satisfaisant à travailler un personnage foncièrement désagréable. Un lâche à l’égo démesuré, qui a tendance à rabaisser les autres pour se sentir en sécurité. Il va faire un sacré voyage dans cette série, et je suis très excité à l’idée de le voir vivre tout ce qui l’attend.
Michael Dialynas : J’aime aussi beaucoup Yorik, car il fait appel à toute une palette d’émotions. J’ai récemment dessiné l’un de mes moments préférés avec lui. La multiplicité de ses visages est incroyable, allant de la sensualité à la colère, en passant par la panique. C’était super. Mais c’est la réponse de James ! De mon côté, je dirais Titus. Il a grandi avec moi tout au long du projet. Je ne m’attendais pas à ce qu’il me touche autant. Je ne veux pas trop en dire, mais ça a été un réel plaisir de dessiner cet homme extrêmement loyal envers ceux qu’il aime.

7. Pouvez-vous nous révéler un petit secret sur la suite, en avant-première ?!

James : Le prochain volume vous plongera dans le royaume des fées. J’ai vraiment hâte que les lecteurs puissent découvrir les nouveaux personnages qui y vivent. Il y aura une jeune fée, Merien, que j’ai en tête depuis que je suis adolescent, et Michael lui a donné vie à la perfection.
Michael : Explosions ! Fées ! Monstres ! Vampires ! Squelettes ! Et beaucoup d’arbres !!!

James TYNION IV est un auteur américain de comics. Il a travaillé sur Batman, mais aussi sur des séries indé telles que Something is Killing the Children ou encore Wynd

Michael Dialynas est l’illustrateur des Tortues Ninja, il a par le passé travaillé sur Ghoastbusters et aujourd’hui sur Wynd

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La magie coule dans ses veines, pourtant elle est interdite dans son royaume ! À première vue, Wynd est un jeune garçon comme les autres. Il mène une vie tranquille à Pipetown, donne régulièrement un coup de main à la taverne locale tenue par sa mère adoptive et aime passer son temps libre à guetter le fils du jardinier royal qui ne le laisse pas indifférent. Mais Wynd a aussi un secret : la magie coule dans ses veines, et ses oreilles pointues en sont le signe extérieur qu’il ne doit sous aucun prétexte exhiber au grand jour. Car, au sein du royaume, la magie est strictement interdite. Les gens comme lui y sont traqués et éliminés. Tiraillé entre son désir d’être un adolescent « normal » et l’envie de comprendre d’où il vient et le sens des rêves étranges qui occupent chacune de ses nuits, Wynd n’aura qu’une solution… fuir. Avec l’aide de sa meilleure amie, Oakley, il va se lancer dans une aventure périlleuse au cours de laquelle il découvrira toute l’étendue de ses pouvoirs extraordinaires mais où l’ombre de celui qu’on appelle l’écorché ne sera jamais loin.

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