Une importante portion de la culture populaire mondiale est née dans l’esprit et sous les crayons de deux jeunes hommes de Cleveland, Ohio. Jerome SIEGEL et Joseph SHUSTER n’ont pas seulement inventé un personnage nommé Superman en 1933, avant de le placer après plusieurs tentatives et itérations dans le numéro 1 d’Action Comics en avril 1938, mais ils ont également créé le super-héros archétypal, celui dont découleront tous les autres jusqu’à nos jours.

Si leur donner le titre d’inventeur du super-héros semble exagéré, disons alors que ces deux fils d’immigrés juifs du vieux continent en ont créé la matrice, le modèle, un représentant si parfait que son succès et son influence ne se sont jamais démentis depuis plus de quatre-vingts ans.

Dès le départ, en tout cas dans la version publiée en 1938, tout est là ou presque : le costume et l’emblème, les origines kryptoniennes, les parents adoptifs, la double identité Clark Kent/Superman et le triangle amoureux avec Lois Lane. Très vite, le héros va se mettre à voler (il se contentait de bondir au-dessus des gratte-ciel, jusqu’ici) et ses origines vont se détailler. Après la Deuxième Guerre mondiale, SIEGEL ajoute un pan de mythologie au personnage en créant Superboy, une version rajeunie de son superhéros dont les aventures se situent à Smallville.

Peu à peu, toute une famille vient entourer le fer de lance de DC Comics avec notamment Supergirl ou Krypto le chien. Dans les années 1950, Superman acquiert de nouveaux pouvoirs dont la thermovision, et ses aventures, plutôt proches des problèmes sociaux américains dans les années 1930, prennent une tournure nettement plus science-fictive et abracadabrante. Sous l’impulsion de scénaristes comme Otto BINDER, l’univers du héros s’enrichit de personnages hors du commun, Brainiac ou Bizarro, et de lieux désormais mythiques comme la Zone Fantôme, la Forteresse de solitude ou la ville en bouteille de Kandor. Deux dessinateurs emblématiques, Wayne BORING jusqu’en 1955 puis Curt SWAN jusque dans les années 1980, donneront l’image classique du personnage jusqu’à sa renaissance sous l’égide de John BYRNE actuellement publiée chez Urban dans les pages de SUPERMAN CHRONICLES.

Mais Superman s’est également échappé des bandes dessinées et sa popularité planétaire découle aussi des adaptations radio, télévisuelles, théâtrales et cinématographiques qui ont débuté très tôt, dès 1940.
Nombre d’enfants du XXe siècle ont grandi avec son modèle et l’impact d’une telle figure n’est sans doute pas négligeable sur certaines destinées humaines (pour s’en convaincre, la lecture du Becoming Superman: My Journey From Poverty to Hollywood du scénariste J. Michael STRACZYNSKI est recommandée).

Si Superman plane comme un idéal du bien pour la jeunesse mondiale, il n’a pas pour autant fini ses aventures dans le neuvième art. Après le mariage avec Lois Lane en 1990, une mort qui a fait grand bruit en 1992 et sa résurrection subséquente, Clark Kent continue de travailler pour le Daily Planet et à affronter les forces du mal pour protéger sa planète adoptive.

Depuis 2015, il est le père d’un fils, Jonathan Kent, qui endosse un temps le costume de Superboy puis devient un nouveau Superman dans sa propre série, SUPERMAN: SON OF KAL-EL.
Quand débute le présent volume, Superman rentre d’une longue période passée sur la planète Warworld d’où il a sauvé tout un peuple de l’esclavage. Il en ramène deux enfants phaelosiens, des descendants des Kryptoniens, que Lois et lui décident d’adopter.

Ses nouvelles responsabilités coïncident avec un changement de comportement de son ennemi de toujours, Lex Luthor… Si Superman est parfois de nos jours un peu trop vite affublé d’une réputation de boy-scout lisse et aux aventures sans intérêt, la lecture de cet album (ainsi que de beaucoup d’autres) prouvera à ceux qui connaissent peu le personnage à quel point il continue d’incarner une certaine modernité. D’abord par l’inventivité des histoires de science-fiction auxquels les scénaristes et dessinateurs le confrontent, mais aussi par l’image qu’il incarne dans un monde de plus en plus complexe et difficile. Les artistes qui président à ses destinées n’ont cessé de faire évoluer celui qui, loin d’être un mythe suranné (si c’était le cas, James GUNN se garderait bien de préparer un nouveau film à son sujet), est devenu un symbole du bien, de la justice et du combat pour les faibles.

Un exemple à suivre pour un monde qui doit aspirer à s’améliorer. Un espoir…

Laurent Queyssi, octobre 2023

https://bdi.dlpdomain.com/album/9791026827375/couv/M385x862/dawn-of-superman-tome-1.jpg

Dawn of Superman tome 1

Superman est de retour à Metropolis et son plus grand ennemi Lex Luthor est enfin derrière les barreaux. Alors que, sous son identité de Clark Kent, il peut reprendre le cours de sa vie, celle-ci prend cependant un tournant très inattendu : bien qu’il soit en prison, Lex Luthor a décidé de céder toutes ses parts de LexCorp à l’Homme d’Acier et de renommer la société SuperCorp. Véritable volonté de rédemption ou nouveau piège machiavélique conçu par le plus grand adversaire du kryptonien ?

Découvrir

Plus d'articles