Année faste pour Batman et Robin qui frappent sur tous les fronts : magazines, journaux et même cinéma, le Duo Dynamique combat malfaiteurs et espions de la cinquième colonne pour le plus grand plaisir de leurs admirateurs, de plus en plus nombreux. Pour les animer, un nouveau dessinateur est embauché : Dick Sprang, et il va avoir une influence considérable.
En réalité, Dick SPRANG travaille sur les titres Batman depuis 1941, mais les responsables de DC Comics ont préféré stocké ses aventures, de façon à pouvoir tenir les délais de production. Et si les premiers épisodes qu’il a réalisés paraissent dans Batman #19, daté d’octobre-novembre, c’est lui qui réalise la couverture du précédent numéro.
Dick SPRANG n’est pas à l’époque un novice en matière d’illustration : né en 1915, il a très tôt fait montre d’un talent artistique et est devenu illustrateur publicitaireà l’âge de 15 ans. Il participe ensuite au journal le Toledo News Bee en tant que directeur artistique, jusqu’en 1934. Puis, il déménage à New York et se partage des missions d’illustrateur freelance avec ses collègues Ed KRESSY et Norm FALLON. Ensemble, ils travaillent sur les strips de Secret Agent X-9 et Lone Ranger. SPRANG devient également illustrateur de pulps, ses romans de gare à sensation, ancêtres des comic books : il ne se contente pas de dessiner mais corrige également les nouvelles publiées, ce qui lui donnera un sens inné de la narration.
Ainsi, plus tard, il n’hésitera pas à modifier certains scripts de Batman qu’il juge trop pingres en action : un privilège unique parmi les dessinateurs du titre. C’est que Dick SPRANG va propulser la série vers de nouvelles cimes : déjà bien servis par Jerry ROBINSON ou Jack BURNLEY, Batman et Robin vont, grâce à ce nouvel artiste, gagner en dynamisme et en sophistication. Car l’apport de SPRANG ne s’arrête pas au découpage ou aux effets audacieux lors des scènes d’action. Il va également étoffer le héros en muscles, raccourcir les oreilles du masque et lui donner au final un physique plus carré qui, aujourd’hui encore fait école, du Dark Knight Returns de Frank MILLER au dessin animé Batman : l’Alliance des Héros, véritable cri d’amour au trait de SPRANG. Le premier numéro qu’il dessine est d’ailleurs une plume éclatante de son talent, puisque les quatre histoires présentes couvrent quatre genres différents : on passe ainsi d’un polar à un affrontement coloré avec le Joker, en passant par un voyage en Atlantide, menacée par l’armée Nazie. C’est également aux forces de l’Axe que s’opposent Batman et Robin lors de leur première incursion sur grand écran. Dans le serial (film composé de plusieurs épisodes diffusés à un rythme hebdomadaire) sobrement intitulé Batman, Lewis WILSON et Douglas CROFT interprètent le Duo Dynamique, aux prises avec le Dr Daka (Carrol NAISH), savant fou japonais. Cette production aura une incidence sur le comic book : car y apparaît en majordome des justiciers, le fidèle Alfred. Ce dernier est apparu quelques mois plus tôt, dans Batman #16 (avril-mai), sous la plume de Don CAMERON et les pinceaux de Jerry ROBINSON : mais c’est un Alfred grassouillet et glabre qu’ont inventé le duo et William AUSTIN, qui l’interprète est, lui, svelte et moustachu. De plus, c’est un Alfred plus proche de la version cinéma, qui apparaît dans une nouvelle version papier du héros : le strip de presse qui débute le 25 octobre 1943. Un mois plus tard paraît la première page du dimanche hebdomadaire et en couleurs. C’est le syndicat McClure, déjà en charge du strip Superman, qui va les distribuer et on retrouve aux commandes, pour ces débuts, les fidèles Bill FINGER et Bob KANE. D’autres auteurs viendront leur prêter main forte, mais il est à noter qu’il s’agit du dernier travail d’importance que réalisera Bob KANE sur son héros.
Enfin, dans les comic books, Batman et Robin continuent de rencontrer des ennemis fantaisistes. Le Cavalier, inspiré par les mousquetaires, apparaît dans Detective Comics #81 de novembre, tandis que les cousins Tweedledum et Tweedledee débutent quelques mois plutôt, dans Detective Comics #74, d’Avril. Ils comblent le vide laissé par un autre scélérat qui, lui, prend sa retraite : dans Detective Comics #80 d’octobre, Double-Face passe sur le billard, et grâce à la chirurgie esthétique retrouve le droit chemin, du moins, pour le moment.