« TIRS AMIS » EST UN OXYMORE

Croyez-moi, ça n’existe pas. C’est une jolie expression qu’on peut utiliser en société. Demandez à n’importe quel soldat ce que ça signifie et il vous répondra « foirage ». Eh bien, faites-moi confiance, c’est exactement ce que ça veut dire. Quand quelqu’un de plus haut que vous dans la chaîne alimentaire fait une énorme connerie et que vous vous retrouvez dans la merde sans aucun soutien, vous n’avez pas envie d’être poli. Après une affectation en Afghanistan et une autre en Irak, j’ai vu de l’intérieur ce qui se passe quand quelque chose tourne

affreusement mal et que les responsables politiques commencent à songer à une « stratégie de sortie ». La première fois que j’ai lu un numéro de DMZ, j’ai été fasciné. J’ai pensé, « Enfin, quelqu’un a compris. Enfin quelqu’un avait les tripes de mettre sur le marché quelque chose en résonance avec ce que les autres troufions et moi pensions, quelque chose de violent et d’atroce. » DMZ est la rencontre entre La Chute du Faucon Noir et Black Flag, et rien n’est édulcoré. C’est la guerre et rien ne va plus.

 


Des amis m’ont envoyé quelques numéros de DMZ quand j’étais dans le nord de l’Irak et au Kurdistan, mais j’ai raté une grosse partie de la série. La première chose que j’ai faite en rentrant aux États-Unis, c’est de rattraper mon retard, et voilà que je me retrouve avec le scénario de TIRS AMIS. C’est à couper le souffle. Prenez un caporal lambda du Midwest qui a le choix entre la révolution, la prison, et pas grand-chose d’autre. Hé mais, s’il s’engage, il pourra faire quelque chose de sa vie, peut-être apprendre un métier, et s’il a vraiment de la chance, il pourra gagner de l’argent pour ses études.

Maintenant, mettez-le dans une sale situation… non oubliez, une situation cauchemardesque, avec le soutien minimum, des dirigeants minables, et une réalité oppressante où chaque action sera sanctionnée. La merde est partout et il se retrouve avec tout sur les bras : game over, mec. Échec planifié dès le premier jour.

Vous n’y croyez pas ? Allez à la guerre et on en reparlera.
Maintenant quand il s’agit d’éviter la casse, ceux qui commandent ont des « carrières » à gérer, des promotions à décrocher, et leurs fesses à sauver. Se mettre en avant et admettre que le système est foutu ou que les militaires souffrent est impensable. Il y a trop en jeu pour les responsables. C’est une vérité intemporelle, historique, et elle pourrait être valable pour n’importe qui, militaire ou pas. Déclarer la guerre n’est pas une tendance qui va disparaître. Les dépenses de l’armée sont une des seules choses qui font survivre notre économie. Quand les évènements de DMZ arriveront, j’espère pouvoir choisir mon camp. Et croyez-moi, il n’y aura rien d’« ami » dans tout ça.

 

SERGENT JOHN G. FORD, U.S. ARMY. OCTOBRE 2007

John G. Ford est un vétéran de la Navy et de l’Armée, il a été affecté en Afghanistan, en Amérique du Sud et en Irak. Il est toujours réserviste, et étudiant à plein temps. Il est marié et a deux merveilleux enfants.

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