Enfant, je n’étais pas vraiment fan de comics. Je n’ai pas grandi avec les super-héros. J’achetais de temps à autre un numéro de Conan le Barbare, mais c’est tout. Pour moi, tout a commencé lorsque l’une de mes amies m’apprit qu’une BD existait avant le groupe : « Quoi ?! », j’étais stupéfait. « Oui, c’était d’abord un comics », me répondit mon amie gothique. « Love and Rockets ? », je voulais être sûr. « Oui. » « Il y a des super-héros ? », moi, incrédule. « Je ne l’ai jamais lu. »

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Sa réponse mit fin à la conversation, et elle ralluma son Walkman. À partir de ce moment-là, je me mis à en chercher un exemplaire. Avant ça, je n’étais jamais rentré dans une librairie spécialisée dans le comics. D’emblée, j’ai vu dans les pages de cette bande-dessiné une forte influence de l’incroyable romancier Gabriel García Márquez. J’étais conquis. Super-personnages, super-ton, super-esprit. Qui a dit que les comics avaient besoin de super-héros ? Et puis Watchmen a fait son entrée. L’un de mes amis punks m’avait prêté son exemplaire tout usé. Il m’avait conseillé de ne respecter qu’une seule règle : ne jamais lire plus d’un chapitre par nuit. Et Dieu sait que c’est difficile de ne pas tout s’enfler d’une traite ! Mais j’ai tenu parole, et j’ai mis douze nuits pour le terminer. Désormais, j’étais affamé, j’en voulais plus. Batman: Dark Knight Returns, Ronin, Elektra, Swamp Thing, tout ces titres que j’avais ignorés pendant longtemps étaient autant de desserts succulents ! Mais bientôt, l’Âge d’Or des années 80, tout comme le hiphop, commença à s’assécher. Les frères Hernandez arrêtèrent de publier. Miller avait pondu des trésors. Moore était une énigme. Au point qu’il semblait parfois même disparaître dans ses propres théories conspirationnistes. Chaque mois, j’allais fâner dans les allées de St. Mark’s Comics ou Forbidden Planet à la recherche de quelque chose de nouveau, d’incroyable.

De quelque chose à couper le souffle. Je flânais. J’arpentais les multiples étages. Mais il n’y avait pas grand-chose. Pendant des années. Presque rien. Alors j’ai commencé à moins m’y intéresser. Mes virées en librairies se sont faites de plus en plus rares. Jusqu’au jour où après avoir mangé un morceau dans Koreatown, je tombai sur une nouvelle boutique : Jim Hanley’s Universe, à l’ombre de l’Empire State Building. J’y entrai sans trop en attendre, mais j’espérais.

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Subitement, je me retrouvai nez à nez avec un chauve fou furieux, affublé de lunettes 3D, d’une fausse barbe et du chapeau emblématique d’Abraham Lincoln. Le dessin était superbe, à la fois habile et aiguisé. Le large sourire du cinglé était… intéressant. Je l’ai attrapé et je l’ai feuilleté. Dès les premiers mots, j’avais compris : vulgarité + rage + révolution + cynisme + drogues + clopes + vérité + justice – retenue = Spider Jerusalem. Son attitude était parfaite, ses tatouages étaient parfaits, ses équipières étaient parfaites. Son nom était parfait. Il a pour moi rejoint la galerie des Classiques. Une œuvre unique. J’attendais la sortie de chaque épisode avec impatience, mais les rumeurs couraient. La fin approchait. LA FIN ?!!?! C’était impossible. Notre monde a besoin de Spider. S’il-te-plaît, Warren. S’il te plaît, Darick. Continuez. Faites en sorte qu’il botte le cul à Batman, qu’il mette en cloque Wonder Woman. Faites-le atterrir dans notre quotidien. Faites-lui rencontrer Bush, qu’il lui donne quelques cours sur la Vérité. Qu’il apporte la paix au Moyen-Orient. Autrement, je serai obligé de retourner errer dans les allées. Affamé. À monter et descendre les étages en quête de quelque chose de suffisamment inspirant pour frapper une nouvelle fois cette planète.

Daren Aronofsky ( 06 juin 2002)

DARREN ARONOFSKY EST NÉ ET A GRANDI À BROOKLYN, NEW YORK. IL A NOTAMMENT RÉALISÉ LES FILMS REQUIEM FOR A DREAM (2000), 
THE FOUNTAIN (2006), THE WREASTLER (2008), BLACK SWAN (2010) ET NOÉ (2014).

[one_third]transmetropolitan-tome-4[/one_third]
[two_third_last]Avoir pour adversaire les deux tiers de la Ville n’est pas chose nouvelle pour le reporter hors-la-loi Spider Jerusalem. Ceci dit, avoir pour ennemi principal le président des États-Unis est une tout autre histoire, surtout lorsque celui-ci est plus enragé qu’un serpent à sonnette sous amphet’. Le temps est donc compté pour Spider et ses loyales (et sordides) assistantes, forcés de se cacher et de mener leur guérilla journalistique via des méthodes plus discrètes. Mais le danger est aussi là où on ne l’attend pas, et Spider risque fort d’en faire les frais.

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